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Semaine du 21 janvier 1999 --N°1785 -- DOSSIER

2 millions de Français se disent victimes de « harcèlement moral »

CES COLLÈGUES ET PATRONS QUI VOUS RENDENT FOU

Ca y est. Il y a enfin une formule en français pour dire l'une des souffrances les plus intimes, les plus clandestines du monde du travail aujourd'hui : le « harcèlement moral ». C'est le titre du best-seller (Syros), signé Marie-France Hirigoyen, un médecin psychothérapeute. Un livre où des centaines de milliers de lecteurs ont déjà retrouvé le portrait-robot de leurs harceleurs de bureau ou d'atelier. Petits chefs ou collègues. Nous avons lu et trié pour vous les récits les plus poignants parmi des centaines de témoignages. Chronique de la violence psychologique au quotidien


Pour un best-seller, c'en est un ! Dans cette grande surface de Marseille, la vendeuse du rayon livres fait la retape au cadre qui vient discrètement l'acheter : « Je l'ai lu, c'est génial. Mais ici aussi c'est comme ça que ça se passe. » « Ça », ce sont les brimades, les pièges tendus, les menaces, les manoeuvres de déstabilisation qui rendent fou. Le harceleur ? Ce peut être un chef, un ou plusieurs collègues. En tout cas, les éditions Syros n'en reviennent toujours pas : leur « Harcèlement moral », tiré à 5 000 exemplaires en septembre dernier, et dont on ne peut pas dire que le titre incite à la gaudriole, ne quitte plus la tête des box-offices depuis maintenant six mois. Sans tambour ni trompette promotionnels, ni le moindre copinage médiatique, le premier ouvrage de Marie-France Hirigoyen, médecin et psychothérapeute, a dépassé en janvier le cap des 60 000 exemplaires ! « Et rien ne nous laisse penser que ça va s'arrêter », confie-t-on, éberlué, chez Syros. Dans le puzzle des très nombreux témoignages donnés par le livre, chacun peut en effet recomposer le portrait-robot du harcelé. Ou reconnaître celui de son tortionnaire. Ainsi ce manager qui reçoit l'ouvrage par la poste avec un petit mot glissé dans les pages : « Lisez ça, mais lisez donc, c'est tout vous ! » Et vlan !
Ce phénomène de librairie en dit long sur une souffrance sociale interdite d'expression, toujours privée en France d'un mot simple pour la désigner, le plus souvent indémontrable, et que rien ou presque ne vient sanctionner : la violence perverse au quotidien. Une terreur froide, jamais physique, mais dont la cible humaine sort généralement usée et brisée, parfois même les pieds devant. Où ? Dans la famille bien sûr - souvenez-vous de la tyrannie sadique de « Tatie Danielle », l'héroïne du film d'Etienne Chatiliez -, mais surtout au travail. Du haut en bas de l'échelle sociale et toutes professions confondues.
Or la France qui vante si souvent son « modèle social » d'exception n'a jusque-là jamais pris au sérieux les études menées en Europe du Nord, en Allemagne ou en Grande-Bretagne sur ce que les Anglo-Saxons appellent d'un mot d'un seul le mobbing (du verbe to mob, molester) ou encore le bullying (de bully, le tyran). Comprenez des agissements hostiles répétés sur une longue durée, commis par une ou plusieurs personnes, et qui dégénèrent en « psychoterreur ». Dans une brochure largement diffusée à Lausanne (Suisse), « Répression du harcèlement sur le lieu de travail », le « mobbing » est présenté ainsi : « Toute conduite abusive se manifestant par des comportements, des paroles, des actes, des gestes, des écrits unilatéraux, de nature à porter atteinte à la personnalité, à la dignité ou à l'intégrité psychique d'une personne, à mettre en péril son emploi ou à dégrader le climat de travail. » Le spectre est large. Trop large ? Risque-t-il de provoquer une déferlante de règlements de comptes et d'accusations fallacieuses ? « Attention, précise la brochure, une procédure disciplinaire sera ouverte à l'encontre de toute personne ayant usé de manière infondée de cette instruction administrative pour nuire à autrui. »
En France, nous sommes loin des dérapages. A dire vrai, nous n'en sommes nulle part : c'est un silence de plomb qui prévaut. Rien, sinon une vague allusion à l'« inconduite » dans notre vieux Code du Travail, qui ne concerne d'ailleurs que le seul employeur, ne vient sanctionner le harcèlement. Or, il faut le savoir, les agressions proviennent, note Marie-France Hirigoyen, largement autant des collègues de bureau ou d'atelier que des supérieurs hiérarchiques, quand ce n'est pas des subordonnés. A combien estime-t-on le nombre de harcelés en entreprise ? Aucune étude française ne peut y répondre. Il n'y en a pas. Le baromètre de la souffrance demeure l'accident - physique - au travail, qui tend officiellement à diminuer. Pas de thermomètre, pas de fièvre.
Dans son livre « Mobbing » publié en 1993 et qui eut outre-Rhin un succès considérable (1), Heins Leymann, le psychosociologue pionnier des recherches sur le harcèlement, estimait pourtant le nombre des victimes en France à 1 million de personnes environ, après avoir extrapolé le pourcentage suédois de 3,5% d'actifs persécutés. Evaluation pifométrique, mais pas si fausse. En 1998, l'enquête de la Fondation européenne (voir infographie) sur les conditions de vie et de travail - 15 000 entretiens dans les quinze pays de l'Union - révélait que 8,1% des travailleurs européens avaient, selon leurs déclarations, enduré des actes d'intimidation et de brimade dans les douze mois précédant l'entretien. Soit au total plus de 12 millions de personnes ! Et la France - 9% - se hisse à la troisième marche du triste podium. Soit 1,9 million d'hommes, et surtout de femmes si l'on compte les seuls salariés.
A bien regarder, le résultat est en fait extrêmement inquiétant pour nos couleurs, car, en l'absence de la plus petite campagne d'information sur ce fléau, l'opinion française n'était familiarisée ni au sujet ni à l'intitulé de la question, d'ailleurs presque intraduisible pour nous. A la différence de la Suède - 10% de harcelés -, qui a, elle, multiplié les enquêtes, reconnu les affections psychosomatiques comme maladies professionnelles depuis une quinzaine d'années et inscrit le « mobbing » sur la liste des délits. A la différence aussi de la Grande-Bretagne - 16% -, où les syndicats, qui ont ouvert un téléphone vert sur les conditions de travail fin 1997, constatent que 38% des appels concernent le harcèlement. Un site Internet spécialisé, très riche en conseils, témoignages, études et multiples liens sur des centaines de pages Web traitant du même sujet, « Bully OnLine » (« le Harcèlement en ligne »[2]), a également été inauguré dans la foulée. Reste que le chiffre stupéfiant de 5 millions de harcelés avancé par les syndicats britanniques doit être mis en relation avec l'ampleur d'une déréglementation qui outre-Manche a transformé le contrat de travail en simple contrat commercial. Pas de surprise : plus le contrat de travail est précaire, plus le harcèlement est fort.
Qu'on ne s'y trompe pas cependant : les salariés plein pot, qu'ils soient du public ou du privé, sont touchés au premier chef par le phénomène, comme en témoignent les quelque cinq cents lettres déjà reçues par Marie-France Hirigoyen après la publication de son livre et qui nous ont aidés à constituer ce dossier. Malgré un statut protégé, leurs réflexes collectifs de solidarité sont amortis par la peur grandissante des licenciements. Voire anéantis : « Mes collègues étaient désolés pour moi. Point », écrit un lecteur. Quand le réflexe de survie ne transforme pas les équipes en complices actives de la sourde corrida. Après de multiples manoeuvres de déstabilisation, Clémence, responsable du marketing, remarque qu'on lui a changé ses codes de téléphone et d'ordinateur. Elle en parle à son voisin de bureau. Réplique imparable : « Arrête, t'es parano ! Tout le monde le dit. »
Christophe Dejours, l'auteur de « Souffrances en France » (Seuil), qui prépare le second colloque sur le sujet au Conservatoire national des Arts et Métiers le 12 mars, l'avait déjà noté : « Les salariés subissent aussi dans leur tête la précarisation. Le malheur d'autrui, non seulement "on n'y peut rien", mais sa perception même constitue une gêne ou une difficulté subjective supplémentaire. La défense est toujours la même : le déni de la souffrance des autres et le silence sur la sienne propre. »
Alors que le nombre de conflits ouverts, rudes, assortis d'empoignades, de grèves, de compromis et de paix des braves, ne cesse de diminuer tant ils sont mal vus, jugés archaïques et attentatoires à l'unité du groupe, les voilà qui réapparaissent par d'autres biais. Torves et tordus. Et là, les authentiques pervers ont d'autant plus les coudées franches que le travail, de plus en plus individualisé, dissout les solidarités d'antan. Les individus visés , eux, en sont réduits à courber l'échine et à tenir, des mois durant, grâce aux anxiolytiques et aux antidépresseurs. Pour pousser vers la sortie, on multiplie les brimades. En dévalorisant. En humiliant. Par des stratégies subtiles de rumeur ou d'évitement. Ainsi s'épanchent pour partie les valeurs de l'« agressivité », ce « cynisme viril » selon le mot de Dejours, tant vantées dans les sessions de management. Comment pourrait-il en aller autrement, note Hirigoyen, « lorsqu'on se flatte à longueur de journée de réussir dans un panier de crabes ou dans un univers de requins » ? Attention. Ce revers de la mutation du travail n'est pas seulement cruel pour quelques-uns. Le prix est lourd, et pour tous : en dépressions, en arrêts de travail, en stress, en baisse de productivité, en « fatigue d'être soi », selon le titre du livre d'Alain Ehrenberg (Editions Odile Jacob), en mortalité aussi. Une enquête menée en Suède montre que 10 à 15% des suicides sont consécutifs à une persécution psychologique. S'il fallait sourire tout de même, c'est avec Daniel Pennac, l'écrivain : il imaginait dans son roman « Au bonheur des ogres » une fonction de bouc émissaire officielle dans l'entreprise pour que les harceleurs puissent se dé- fouler franchement. Le romancier avait une longueur d'avance sur les sociologues et les politiques. Lui au moins inventait un vrai job, à plein temps. G
(1) Seuil, 1996.
(2) Voir aussi le site de Lausanne en français : http : //www. vpod. ethz. ch/f/mobbf. htm

GUILLAUME MALAURIE

Portrait-robot de l'agresseur


Marie-France Hirigoyen consacre un chapitre à passer aux rayons X l'agresseur type. Entendez le « pervers narcissique » absolu. Reste que, si vous ne vous retrouvez que partiellement dans le portrait-robot qui suit, vous n'êtes pas pour autant au-dessus de tout soupçon. Le harceleur modèle se pose d'abord « comme référent, étalon du bien et de la vérité, et on lui attribue souvent un air supérieur et distant. Même s'il ne dit rien, l'autre se sent pris en faute ». Ensuite « il entre en relation avec les autres pour les séduire. Une fois le poisson attrapé, il faut seulement le maintenir accroché tant qu'on en a besoin. Autrui n'existe pas, il n'est pas vu, pas entendu, il est seulement "utile" ». Le harceleur est aussi un vampire : « Passant à côté d'eux-mêmes, ils essaient de détruire le bonheur qui passe près d'eux. Ils s'attaquent ensuite à l'estime de soi, à la confiance en soi chez l'autre pour augmenter leur propre valeur. » On peut reconnaître le suspect à sa voix : « Elle est froide, blanche, plate, monocorde, sans tonalité affective. Bref c'est une voix qui inquiète, laissant affleurer dans les propos les plus anodins le mépris ou la dérision. [...] Très souvent le pervers ne fait pas l'effort d'articuler, ou bien grommelle quelque chose quand l'autre est dans une autre pièce. Cela met l'autre dans l'obligation de se déplacer pour entendre ou bien d'être en position de demandeur en faisant répéter. » Il est également stratège, le pervers : « Plus souvent qu'un mensonge direct il utilise d'abord un assemblage de sous-entendus, de non-dits destinés à créer un malentendu pour ensuite l'exploiter à son avantage. » Et « même dans des cas de conflit apparemment ouvert, le sujet réel de la discorde n'est jamais évoqué vraiment. La victime ne sait pas où elle en est, accumule de la rancoeur. » Dernier détail : le pervers est un tchatcheur, rhéteur même. « Il aime la controverse. Il est capable de défendre un point de vue un jour, un autre le lendemain. » L'important pour lui, c'est de déstabiliser en prenant son temps. Saper à petits coups de canif et laisser sa proie porter le coup qui lui sera fatal.

G. M .

Le désarroi des médecins du travail

Formés à soigner les corps, ils sont souvent désemparés face aux souffrances morales. Quelques-uns ont entrepris de rechercher les racines du mal


Des récits de harcèlement moral, les médecins du travail n'arrêtent pas d'en entendre. Et ils se sentent souvent désarmés. En général, ils orienteront le patient vers le généraliste ou le psychiatre. Dans des cas plus dramatiques, ils pourront négocier avec l'entreprise une mutation ou un changement de service. « En fait, ils ne savent pas comment répondre à la persécution, explique François Desriaux, rédacteur en chef de la revue "Santé et travail". Certains l'admettent, d'autres préfèrent tourner la tête et ne traiter que la maladie physique. Quelques-uns s'organisent. »
Le collectif regroupé sous le label Psychodynamique du Travail est de ceux-là. Ces médecins estiment que la parution du livre de Marie-France Hirigoyen a le grand mérite de rendre public le phénomène de harcèlement psychologique. Mais ils voudraient mener ce débat bien plus loin que dans les cabinets de psychanalyse : à l'Assemblée nationale et dans les ministères.
Pour eux, ces conflits sont bien sûr des symptômes. Ils dénoncent en choeur l'évolution du travail depuis dix ans : l'intensification des rythmes, la précarité, la concurrence accrue, le lent démantèlement des solidarités... « Les entreprises regorgent d'histoires de harcèlement personnalisé, qui font les beaux jours de certaines formes d'organisation du travail. Pendant ce temps elles échappent à toute critique », regrette Dominique Dessors, psychoclinicienne du travail au Centre national des Arts et Métiers. Dominique Huez (1), médecin à la centrale nucléaire de Chinon, poursuit : « Certains sont mis dans des situations de pression, de concurrence, et n'ont pas d'autre solution que de soumettre à leur tour les autres à un stress de même nature. »
On ne compte plus en effet les cas de harceleurs harcelés. Un médecin évoque ainsi un chef de service qui a traumatisé son entourage : « Un homme qui a peu de connaissance du terrain et des difficultés évidentes de communication. Depuis des années, il gère ses troupes en appliquant des consignes, et c'est calamiteux. La souffrance qu'il inflige aux autres est proportionnelle à la sienne. » Autre témoignage, à propos d'un contremaître « responsable » de plusieurs dépressions dans son atelier : « C'est un brave type. Vraiment. Seulement, à force de gérer des machines dans le même atelier depuis des années, il s'était mis sur pilotage automatique et gérait ses ouvriers comme des machines. Forcément ça a fini par péter... »
Il arrive souvent qu'un salarié épuisé s'excuse auprès du médecin ; il s'accuse d'être devenu « parano ». « J'ai l'impression de devenir fou » : cette phrase, on l'entend souvent lors des consultations. Faute de mieux, le médecin s'efforce, et c'est déjà beaucoup, d'aider son patient à ne pas sombrer dans la culpabilité et l'autodépréciation : si folie il y a, il faut la chercher ailleurs.

(1) Coauteur du livre « Des médecins du travail prennent la parole » (Syros.)

Anne Crignon

Où s'adresser ?


Les interlocuteurs naturels sont les DRH - lorsqu'il y en a et qu'ils sont dignes de confiance. Mais aussi les comités d'entreprise, les syndicats et bien sûr les médecins du travail ainsi que les associations.
Avant d'engager des procédures aux prud'hommes ou en justice, il est parfois possible de faire valoir le règlement intérieur. Récemment dans une grande entreprise publique, un harceleur a été ainsi sanctionné : « La commission de discipline, considérant que M. X [...] a tenu des propos vexatoires ou humiliants faisant preuve d'une cruauté gratuite et de mépris à l'égard des agents, que la persistance dans le temps du comportement est avéré par les nombreux témoignages recueillis au cours de l'enquête, constate que ceci est indigne d'un cadre de direction. »

Le souffre-douleur s'est effacé


« On me prend pour un con, pour une sous-merde... Je n'en peux plus ! », avait-il confié à son frère la veille de son suicide. Cette phrase, Gérard Fraslin l'a souvent répétée dans sa tête. Sur son lieu de travail, elle lui venait à l'esprit à chaque humiliation, à chaque brimade de la part de collègues qui se sont acharnés sur lui. Pendant de longs mois, ces mots ont été une boule douloureuse au fond de sa gorge, comme une plainte qui se venge de ne pas pouvoir sortir. Pouvait-il leur dire, à eux, qu'il chialait tous les soirs en rentrant chez lui ? Pouvait-il risquer de passer encore pour une « femmelette » ? Et puis, qui l'aurait soutenu ? Quelques heures après avoir prononcé ces mots, Gérard Fraslin s'est pendu. L'acte de désespoir d'un homme à bout de forces, mort d'être nié chaque jour dans sa dignité.
En 1993, Gérard Fraslin, employé du service voirie de la mairie de Saint-Herblain, est victime d'un accident du travail. Il en garde des séquelles qui nécessitent un reclassement. Il rejoint alors l'équipe chargée du montage des podiums municipaux pour les concerts. Un travail de manutention essentiellement - il doit porter de lourdes charges - et... une fâcheuse erreur d'affectation pour quelqu'un qui souffre du dos. En mars 1997, après une procédure auprès de la médecine du travail, Gérard Fraslin bénéficie d'un « mi-temps thérapeutique ». Il conserve l'intégralité de son salaire, ce qui ne manque pas de susciter la jalousie de ses collègues. Très vite, Gérard devient leur tête de Turc. Fait aggravant : dans un milieu où l'on aime les boissons d'hommes, Gérard Fraslin n'est pas un adepte du : « on va s'en jeter un petit ? ». Comme il ne boit pas, on lui accole aussitôt l'étiquette de « gonzesse ». Septembre 1997, nouvel accident du travail. Personne ne le croit : il est seul au moment des faits. « Ce qui, précise Laurent Priou, le secrétaire du syndicat CGT de la mairie, à qui le harcelé avait fait part de ses difficultés, est une irrégularité. Gérard aurait dû être accompagné. » Tout ça ne fait que conforter son image déjà bien installée de planqué-tire-au-flanc-pleurnichard. Une image qu'il ne supportait plus et qu'il a choisi d'étrangler.

M.-H. M.


Nouvel Observateur - N°1785

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